Des bas-fonds à la scène mondiale : l’incroyable voyage du tango argentin…

Le tango : un langage universel, une danse sans frontières

Après avoir conquis Paris, le tango poursuit sa conquête des cœurs et son voyage effréné à travers le monde. Aujourd’hui, il se danse sur les cinq continents, dans de grandes métropoles comme New York, Rome, Barcelone, Sydney, Séoul, Montréal, mais aussi dans des endroits reculés, auxquels on ne saurait penser...
C’est simple : le tango a des pouvoirs d’adaptation impressionnants !

Ce qui est fascinant ? Peu importe où l’on danse, le langage du tango reste toujours le même. Que vous soyez à Buenos Aires, Sydney ou Tokyo, le guidage est identique, et l’improvisation s’effectue sans avoir besoin de parler. C’est un peu comme une conversation où le corps devient le traducteur universel… Si vous dansez le tango, vous appartenez à une même communauté !

L’évolution du tango : une histoire de hauts et de bas

En Argentine, le tango connaît un premier essor dans les années 1920, avec l’apparition de grands orchestres, comme celui de Canaro ou de Roberto Firpo...
Entre 1930 et 1955, le tango connaît son âge d’or. Les grands orchestres comme ceux d’D’Arienzo, Troilo, Pugliese, Di Sarli atteignent leur maturité artistique.

La qualité musicale et l’arrangement des morceaux deviennent très sophistiqués. Les radios diffusent du tango en continu, les milongas (bals de tango) fleurissent : plusieurs centaines par jour rien qu’à Buenos Aires ! C’est un phénomène de masse, avec véritablement toute une génération qui vibre et danse au son du tango.

Le tango va connaître un coup d’arrêt dans les années 60 en Argentine. Le pays est traversé par des changements sociaux et politiques profonds. Le régime militaire le considère comme subversif et l’interdit dans de nombreux lieux publics… De plus, à cette époque, c’est le rock’n’roll qui capte l’attention de la jeunesse.
Le tango sombre peu à peu dans l’oubli, il semble associé à une époque révolue, et peine à se renouveler.
Mais, comme tout grand classique, il revient toujours à la vie !...

Les années 80–90 : le tango renaît en Europe et au-delà

Au tournant des années 80, l’Argentine sort de la dictature, et le tango connaît une véritable résurrection à l’extérieur de son pays natal. En Europe, et aux États-Unis notamment (où le tango argentin avait été absorbé et transformé en tango standardisé par des danses de salon), on redécouvre cette danse avec un grand engouement…

La tournée mondiale de « Tango Argentino » est un déclencheur majeur. Créé par les danseurs Claudia Miazzo et Gustavo Russo, ce spectacle transforme le tango de piste en tango de scène (tango escénario).
Merci aussi à tous les artistes argentins exilés d’avoir redonné vie au tango, et rallumé la flamme dans la sphère internationale en le transmettant avec passion !!

Petite note rigolote : en Finlande, le succès est tel qu’un phénomène prend forme : le tango se transforme et se réinvente, donnant naissance à un tango local très particulier que je vous laisse aller visionner !

Les années 1990–2010 : la révolution du tango nuevo

Le tango nuevo, initié par Astor Piazzolla dans les années 80 avec des influences de jazz et de musique classique, devient un phénomène mondial, et prend une place de plus en plus importante sur les pistes de danse. C’est une période où les jeunes générations boudent parfois le tango traditionnel au profit d’un tango plus expérimental, incarné par des figures comme Gustavo Naveira ou Chicho Frumboli.

C’est l’époque des volcadas, des colgadas et des figures spectaculaires inspirées du tango fantasía, qui se retrouvent sur les pistes, mais aussi dans les scènes de tango escénario.
Les jeunes danseurs, issus d’autres danses comme la danse contemporaine, explorent de nouvelles formes de tango, moins centrées sur la tradition et plus ouvertes à la créativité individuelle.

En créant des mouvements toujours plus amples, les couples occupent plus de place sur la piste de danse et circulent moins. Ce tango s’affranchit des règles strictes et se danse parfois dans une posture plus ouverte.
C’est un tango qui aime bousculer les habitudes, qui se permet quelques folies, tout en restant profondément ancré dans l’esprit de la danse.
C’est un peu comme le cousin rebelle du tango traditionnel : il aime surprendre, expérimenter, et parfois même se permettre un petit pas de danse imprévu.

Cependant, ce style plus moderne tend à se perdre avec le temps, tandis que le tango traditionnel continue de séduire toujours plus.
Pour vous donner une idée, dans la plupart des grands festivals, vous pouvez encore passer d’une soirée ultra-traditionnelle à une milonga alternative où l’on danse le néotango, mais les grandes salles, bondées de monde, sont réservées au tango traditionnel et les pistes alternatives sont dépeuplées...

L’émergence du tango queer : un tango sans frontières de genre

Aujourd’hui, on peut observer l’émergence du tango queer, qui secoue les rôles de genre ! En effaçant les frontières traditionnelles entre le leader et le follower, le tango queer permet à ces deux rôles de s’équilibrer.

Le tango queer offre un espace où les personnes de toutes orientations sexuelles et identités de genre peuvent danser librement, sans être contraintes par les normes traditionnelles.
Il favorise un environnement communautaire, inclusif et respectueux, où la danse devient non seulement un moyen d’expression artistique mais aussi de solidarité et de soutien pour la diversité.

Il permet également à chacun d’explorer les deux positions – leader et follower .
Cette liberté a un impact profond sur la pratique, y compris dans le tango traditionnel.
Le rôle du follower s’enrichit : il ne s’agit plus uniquement de suivre, mais de proposer, de réagir, de participer activement à la construction de la danse.

Le tango traditionnel : une danse en constante évolution !

Aujourd’hui, une tendance claire émerge : le tango traditionnel, les vieux orchestres et l’abrazo fermé attirent de plus en plus de jeunes danseurs. Oui, vous avez bien lu !
Mais attention,

tradition ne veut pas dire stagnation...

Le tango évolue sans cesse.

Et grâce à l’émergence du tango queer, et des courants contemporains, les followers gagnent en autonomie, en capacité d’initiative : le dialogue corporel devient plus équilibré.

Le tango évolue sans cesse, se transforme, intègre de nouveaux regards. Il traverse les générations, les continents et les identités, mais garde son essence.